Que ce soit à quatre mains, à huit yeux ou à douze langues, traduire ensemble n’est pas une mince affaire, mais quel plaisir que celui-ci ! Un Printemps de la traduction très… collectiviste.
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Le Printemps 2022 en un clin d’œil :
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10h Accueil Café – Maison de la Poésie
10h30 Table ronde : “La traduction chorale” (1h45) – Maison de la Poésie
12h30 Buffet – Institut suédois
14h30 Ateliers de traduction collective (2h)
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Anglais et créole jamaïcain – Maison de la Poésie
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Arabe – Maison de la Poésie
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Géorgien – Maison de la Poésie
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Suédois – Institut suédois
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17h Lecture scénique et musicale : “Alors, c’était comment ?” (1h) – Maison de la Poésie
10h30 – Table Ronde : “La traduction chorale “ (1h45)
Généralement, le traducteur travaille seul et le dialogue qu’il entame avec son texte est silencieux. Mais lorsqu’on traduit à plusieurs, comment ce dialogue s’articule-t-il ? Comment l’aborde-t-on ? Avec quels enjeux et dans quelle perspective ?
Anne Portugal et Pierre Alferi (Mue, de Stacy Doris, éditions P.O.L, 2021), Anna Proto Pisani et Judith Obert, du collectif qui a traduit Princesa, de Fernanda Farías de Albuquerque & Maurizio Iannelli (Héliotropismes, 2021), ainsi que Pierre Bondil et Johanne Le Ray (Le Sphinx et autres histoires, de Edgar Allan Poe, éditions Gallmeister, 2020) ont témoigné de leur expérience et des différentes façons d’aborder cette pratique dans une table ronde modérée par Santiago Artozqui, traducteur de l’anglais et de l’espagnol et directeur de la publication de la revue En attendant Nadeau : « La traduction chorale ».
À la Maison de la Poésie
Pierre Alferi, né en 1963, est l’auteur d’une vingtaine de livres de poésie, de romans et d’essais (la plupart chez P.O.L), mais aussi de films expérimentaux et de pièces sonores, de livres d’images et d’affiches. Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions, projections, lectures et performances, en France et à l’étranger. Ses pièces de théâtre pour Fanny de Chaillé ont été programmées au Festival d’Automne et au Festival d’Avignon. Divers chaos (P.O.L) 2020) rassemble des cycles de poèmes courts. Son dernier roman, Hors sol (P.O.L, 2018 et Folio SF, 2021) est un récit choral d’anticipation. Il enseigne la littérature aux Beaux-Arts de Paris.
(site : alferi.fr, instagram :@pierrealferi).
Pierre Bondil Après des études d’anglais à Paris X Nanterre, Pierre BONDIL a été professeur d’anglais de 1976 à 2011, d’abord en collège, puis en IUT génie mécanique. En parallèle de l’enseignement, il s’est consacré dès 1981 à la traduction de l’anglais (américain, britannique, irlandais, canadien, australien, africain du Sud…) au français. Il a travaillé pour une vingtaine d’éditeurs (Rivages, Gallimard, Gallmeister, Albin Michel, Nathan…) et traduit environ 160 livres (romans policiers, « littéraires », livres de photographies…) et une cinquantaine d’auteurs, de J.J. Audubon à Dashiell Hammet, Stephen Crane, ou encore Edgar Allan Poe.
Johanne Le Ray Traductrice de littérature américaine depuis 2006, elle a suivi un double cursus universitaire à Paris 7, en Lettres modernes et en Littérature américaine. Agrégée de lettres, docteur en lettres, elle partage sa vie entre l’enseignement, la traduction et la recherche en littérature (spécialiste d’Aragon, elle s’intéresse aussi aux auteurs-traducteurs et à la traduction au sens large). Elle a notamment traduit du roman noir chez Rivages (Elmore Leonard, Jim Thompson) et a publié, en co-traduction avec Pierre Bondil, une retraduction intégrale des Tales d’Edgar Poe chez Gallmeister. Parmi ses nombreux rêves de retraduction figurent, en première place ex aequo, The Heart is a lonely hunter et The Member of the wedding de Carson McCullers.
Anne Portugal, poète et traductrice, a publié une douzaine de livres, dont la plupart aux éditions P.O.L., De quoi faire un mur (1987), Le plus simple appareil (1992), définitif bob (2002), la formule flirt (2010), et comment nous voilà moins épais (2017). Elle a traduit Paramour (P.O.L.) de Stacy Doris, avec Caroline Dubois, L’anglais mêlé de Caroline Bergvall, avec Abigail Lang et Vincent Broqua (Presses du réel) et sonnetssonnants d’Andrew Zawacki (joca seria). Elle s’intéresse à la syntaxe, ou plus précisément à la « fantaxe » et s’amuse à déconstruire les lieux communs de la poésie qu’elle définit comme « un art de ne pas y toucher ».
Anna Proto Pisani est enseignante, animatrice d’ateliers d’écriture et création et chercheuse. Ses domaines de recherche portent sur les écritures migrantes et postcoloniales. Elle est l’auteure des ouvrages collectifs Les littératures de la Corne de l’Afrique. Regards croisés (2016) et Paroles d’écrivains : écritures de la migration (2014) ainsi que de différents articles sur les écritures contemporaines. Avec l’Université de Roma 3 elle a réalisé le projet www.princesa20.it/fr, l’édition numérique et multi-médiale de Princesa, une des premières voix de la littérature transgender et de la migration en Italie. Puis, avec un groupe de chercheuses et de traductrices, elle a co-traduit en français ce livre paru aux éditions Héliotropismes.
Judith Obert est Maîtresse de conférences à l’Université d’Aix-Marseille ; ses enseignements, au sein du département d’études italiennes, vont de la traduction littéraire à la littérature contemporaine en passant par l’histoire du théâtre ; dans sa recherche elles parcourt les sentiers obscurs et variés de la littérature fantastique et de l’étrange à travers les œuvres de Landolfi, Calvino, Malerba, Tabucchi et Benni entre autres, analyse la représentation du sport dans la culture italienne et travaille sur la traduction, individuelle ou collective. Elle a animé des ateliers de théâtre au sein du département d’études italiennes avec les étudiants afin de donner vie et corps aux textes.
© Julien Bourgeois
12h30 – Buffet
À l’Institut suédois
Buffet festif dans les magnifiques jardins de l’Institut suédois !
14h30 – Ateliers de traduction collective (2h)
© Annika Lyth / Albert Bonniers Förlag
Atelier de suédois, animé par Jean-Baptiste Coursaud
« Traduire la musicalité chez Sara Stridsberg »
Dans l’exofiction sur Valerie Solanas qui l’a révélée, La Faculté des rêves (Albert Bonniers Förlag, 2006), couronnée par le prestigieux prix du Conseil Nordique, Sara Stridsberg initiait un nouveau courant littéraire en Scandinavie : une prose poétique portée par un rythme quasi versifié et des sonorités omniprésentes.
En avant-goût des 39es Assises de la traduction littéraire à Arles en novembre prochain, consacrées à la traduction de la musique, c’est cette musicalité que son traducteur, Jean-Baptiste Coursaud, proposait de restituer en travaillant avec les participants sur quelques paragraphes tirés du roman.
A l’Institut suédois
© Akashic Books
Atelier d’anglais & créole jamaïcain, animé par Gerda Cadostin & Karine Reignier-Guerre
Autour de A Tall History of Sugar, de Curdella Forbes (Akashic Books, 2019)
À la fin des années 1950, un modeste pêcheur et sa femme trouvent un bébé dans un panier de roseaux au bord de la mer des Caraïbes… Ainsi commence l’épopée de Moshé, petit garçon albinos à l’apparence si étrange que nul ne sait de quel monde il vient. Son histoire, narrée par Arrienne, son amour d’enfance, dépeint une Jamaïque rurale marquée par l’héritage du colonialisme. Porté par un souffle lyrique étourdissant, le récit nous plonge dans une langue qui, comme son héros, résiste aux classifications : mêlant l’anglais standard au créole jamaïcain, elle semble défier toute tentative de traduction. Comment restituer la matière sonore de ce roman résolument bilingue ? Ne faut-il pas déployer aussi deux langues, et donc deux voix et quatre mains, pour traduire l’histoire d’Arrienne et de Moshé – et, à travers elle, celle de la jeune nation jamaïcaine ?
Née en Jamaïque en 1957, Curdella Forbes enseigne la littérature caribéenne à Howard University. Elle nous offre ici son cinquième roman – le premier à être traduit en français. Il paraîtra chez Globe en 2023.
À la Maison de la Poésie
Karine Reignier-Guerre Née en 1970 à Paris, elle étudie le russe, l’anglais et les langues anciennes au lycée, puis à l’université (Sorbonne-Nouvelle et ESIT). Plus tard, incorrigible gourmande, elle obtient aussi un CAP de cuisine. Traductrice littéraire depuis 1995, elle exerce d’abord son métier par monts et par vaux en pays anglophones, avant de se poser à Paris, puis à Arles. Traductrice d’auteurs aussi différents que Diana Evans, Satish Kumar ou MC Beaton, dans des domaines variés (fiction, essais, récits et documents), elle anime parallèlement des ateliers et joutes de traduction à destination du grand public. Depuis septembre 2009, elle est aussi chargée de cours et tutrice en master de traduction littéraire professionnelle anglais-français à l’Université Paris-Diderot. Élue au conseil d’administration d’ATLAS, elle en est l’heureuse secrétaire générale depuis mars 2020. Elle fait également partie du comité de rédaction de la revue Translittérature.
© Al-Karma
Atelier d’arabe, animé par Lotfi Nia
Autour de Kitab el-Nawm كتاب النوم, de Haytham el-Wardany (Al-Karma, 2017)
Approche phénoménologique de la chambre à coucher, récit de rêve, politique du corps dormant… – c’est par succession de courts chapitres en prose que s’esquissent ces essais sur le sommeil.
Croiser la prose du français et le texte de Haytham el-Wardany est très tentant. La petite salle de la Maison de la poésie nous donnait pour première contrainte de nous priver de tables. Cet exercice de traduction était d’abord collectif parce qu’on n’avait ni tables, ni ordinateurs, ni feuilles ni crayons. Pour renforcer cette suspension de l’écrit (et donc du sens de la vue) en traduction, certaines séquences de l’atelier se sont faites à l’aveugle (ou en sommeil), les yeux bandés.
À la Maison de la Poésie
© Sulakauri
Atelier de géorgien, animé par Maïa Varsimashvili-Raphael & Isabelle Ribadeau Dumas
Autour de Ténèbres sacrées, de Levan Berdzenishvili (Sulakauri, 2010)
Durant les seize siècles de son histoire, la littérature géorgienne a offert une très grande diversité de mouvements, de genres, de sujets, de styles, allant du récit hagiographique au roman post-moderniste. Cette histoire s’écrit dans un continuel échange avec les autres aires culturelles et linguistiques. Elle est traversée par une quête identitaire et par des interrogations sur la condition humaine, sur le rapport complexe entre l’homme et la société.
Le livre de Levan Berdzenishvili, Ténèbres sacrées (Noir sur Blanc, 2022), nous parle d’hommes d’esprit libre, enfermés dans un goulag. Seulement, ce goulag d’un système agonisant n’est pas celui que Soljenitsyne ou Chalamov nous avaient fait connaître. Traitant ses personnages avec une grande empathie et prouvant son talent pour « rire en pleurs », l’auteur géorgien se montre un habile narrateur, un érudit et un fin observateur. Un livre passionnant, mais qui laisse le traducteur face à de nombreux problèmes.
À la Maison de la Poésie
Auteur d’articles parus dans des recueils collectifs et revues en France et, à l’étranger, d’un ouvrage (L’itinéraire géorgien de l’avant-garde, L’Harmattan, 2019). Elle a traduit en français des auteurs géorgiens, par exemple Les merveilles de la forêt de Revaz Inanichvili (Editions Meduza, 2021) ou La mue du serpent de Grigol Robakidzé, traduit avec Isabelle Ribadeau Dumas (Gingko éditeur, 2020).
Quelques traductions à paraître : Mikhéil Djavkhichvili, Les aventures de Kvatchi (Gingko éditeur, à paraître en juin 2022) ; Niko Lordtkipanidzé, Les nids démolis, (Éditions Meduza, juin 2022) ; Constantin Gamsakhourdia, Le sourire de Dionysos (Ginkgo éditeur, 2023) ; Théimuraz Bablouani, Le soleil, la lune et les champs de blé (Le Cherche Midi, 2023).
Isabelle Ribadeau Dumas est traductrice du géorgien et du coréen. Depuis le géorgien, elle a traduit avec Rusudan Turnava Erlom Akhvlediani, Un moustique dans la ville d’Erlom Akhvlediani (Le Serpent à plumes, 2017), et avec Maïa Varsimashvili-Raphael : La mue du serpent de Grigol Robakidzé (Ginkgo, 2020) , Ténèbres sacrées de Levan Berdzenichvili (Noir sur Blanc, 2022) et Le verger de poiriers de Nana Ekvtimichvili (Noir sur Blanc, 2023). Depuis le coréen, elle a traduit avec Lee Hyonhee : Le jour du chien noir de Song Si-woo (Matin calme, 2020) ; Point de fuite de Kim Hee-jae (Matin calme, 2021) ; Kim Yi-sak, Par une nuit claire de Kim Yi-sak (Matin calme, à paraître en 2022), Le travail du numéro 9, de Kim Hye-jin, bourse de traduction attribuée par la Fondation Daesan, 2022 ; Archéologie de la mémoire et Le bus, passe, traduction des deux nouvelles de Ham Jeung-im commandée par LTI Korea, 2022.
17h – Lecture scénique et musicale « Alors, c’était comment ? » (1h)
Par Manuel Ulloa-Colonia, avec Cécilia Steiner et Moïra Montier-Dauriac
Traduire les yeux bandés, trouver le ton juste pour faire rire avec le goulag, créoliser notre façon de traduire, accorder les harmoniques du français à la basse continue du suédois, cet après-midi-là, on aurait tant aimé être partout à la fois.
Pour se retrouver et voyager ensemble aux quatre points cardinaux, Géorgie, Jamaïque, Suède et Egypte, quoi de mieux alors que de se rassembler autour d’une lecture musicale orchestrée par Manuel Ulloa, avec Cécilia Steiner et Moïra Montier-Dauriac ? Une lecture en corps et en musique élaborée à partir des textes travaillés en atelier pendant ce Printemps de la traduction.
À la Maison de la Poésie
Cecilia Steiner est née à Zurich. Elle obtient un Bachelor d’art dramatique à la Haute École des Arts de Berne en Suisse. Durant son cursus, elle crée avec d’autres étudiants et intervenants, Seven Days of Ugliness, joué en Suisse au Théâtre de Bâle, au Festival Theaterspektakel à Zurich et au SKENA-UP Festival à Pristine au Kosovo (prix pour la meilleure performance). Elle participe aussi à un projet du Théâtre Neumarkt à Zurich sur Andy Warhol (Andy). À Paris, elle intègre l’École du Jeu. En 2011, elle rencontre le metteur en scène Markus Kubesch, avec lequel elle créera Freaks au Théâtre X-Werk à Vienne en Autriche en 2017. En septembre 2016 elle est recrutée par le GEIQ théâtre compagnonnage, dispositif d’insertion pour jeunes comédiens, en alternance sur un parcours de 2 ans. Elle y rencontre notamment Maïanne Barthès et joue dans Antigone Faille Zero Day, Les Ménines (Sylvie Mongin-Algan), Merci la Nuit (Raphaël Defour). En 2019, elle joue dans la série allemande Tatort (Andreas Senn) et le film Un ouvrier (Hans Kaufmann). En 2020 elle remporte le prix du cinéma suisse pour le meilleur rôle secondaire.
Moïra Montier-Dauriac, contrebassiste de Jazz, a travaillé avec Alexis Forestier, Paris combo, Téofilo Chant-re, Tony Gatlif, et bien d’autres dans différents univers.