Cet atelier intensif d’une semaine a réuni en 2019 de jeunes traducteurs indépendants et/ou chercheurs, traduisant entre français d’une part, allemand, anglais ou italien d’autre part, dans un sens ou dans l’autre. Les participants ont apporté un projet de traduction en cours dans le but de partager leurs interrogations et d’approfondir leurs compétences traductives.
S’agissant de philosophie, le plurilinguisme allemand, italien, anglais s’impose, car c’est en général sur l’axe nord sud allemand-italien que s’effectuent les premières traductions, puis en fonction de l’axe est-ouest allemand-français-anglais qu’a lieu une réception seconde.
La diversité des projets apportés constitue toujours un atout pour la richesse des échanges, et a permis de mettre le travail sur les textes au centre de cet atelier coordonné par Marc de Launay – traducteur de nombreux philosophes allemands, chercheur aux Archives Husserl de Paris (ENS-Ulm) et spécialiste des courants néokantistes.
Marc de Launay – Coordinateur de l’atelier
Marc de Launay est chercheur aux Archives Husserl de Paris (ENS-Ulm) spécialiste des courants néokantistes. Il s’est également consacré à la traduction de philosophes allemands (Kant, Schelling, Nietzsche, Husserl, Cohen, Rosenzweig, Scholem, Cassirer, Adorno, Habermas, Blumenberg). En septembre 2019, il est distingué par le Prix Étienne-Dolet de la Sorbonne, pour son œuvre de traducteur. Il dirige actuellement l’édition des œuvres de Nietzsche dans La Pléiade.
Ses principales publications : Nietzsche. Essais d’autocritique, Paris, Le Seuil, 1999 ; Nietzsche. Correspondance choisie, Paris, Gallimard, 2008 ; Néokantismes et théorie de la connaissance, Paris, Vrin, 2000 ; Une Reconstruction rationnelle du judaïsme, Genève, Labor et Fides, 2002 ; Qu’est-ce que traduire ?, Paris, Vrin, 2006 ; Lectures philosophiques de la Bible, Paris, Hermann, 2008 ; Der Begriff der Geschichte im Marburger und Südwestdeutschen Neukantianismus, (en collab. avec Ch. Krijnen), Würzburg, Königshausen & Neumann, 2013 ; Configurations du nihilisme, (en collab. avec M. Crépon), Paris, Vrin, 2012 ; L’événement du texte, Paris, Hermann, 2015
Atelier en résidence au CITL d’Arles du lundi 28 octobre au vendredi 1er novembre 2019
La rencontre à l’écoute [1h24]
Contact La Fabrique des Humanités
Ameline Habib – Responsable pédagogique des formations
Email: ameline.habib@atlas-citl.org
Tél. : 04 90 52 05 50
Marc Crépon – Invité de la soirée de clôture
Né en 1962, directeur de recherches au CNRS (Archives Husserl), actuellement directeur du Master de philosophie de l’université PSL.
Marc Crépon travaille en philosophie morale et politique, avec pour fil conducteur la question de la violence. Il a publié, entre autres : Les géographies de l’esprit, Payot, 1996 ; Le Malin génie des langues, Vrin 2000 ; Les Promesses du langage, Benjamin, Rosenzweig, Heidegger, Vrin, 2001 ; Nietzsche, l’art de la politique de l’avenir, PUF, 2003 ; Terreur et poésie, Galilée, 2004 ; Langues sans demeure, Galilée, 2005 ; Altérités de l’Europe, Galilée, 2006 ; La culture de la peur, identité, sécurité, démocratie, Galilée, 2008 ; Vivre avec, la pensée de la mort et la mémoire des guerres, Hermann, 2008 (traduit en anglais) ; La guerre des civilisations, Galilée, 2010 ; Le consentement meurtrier, éd. Du Cerf, 2012 ; Élections, de la démophobie, Hermann, 2012 ; La vocation de l’écriture, la littérature et la philosophie à l’épreuve de la violence, éd. Odile Jacob, 2014 ; La gauche, c’est quand ?, éd. de l’équateur, 2015 ; L’épreuve de la haine, essai sur le refus de la violence, éd. Odile Jacob, 2016 ; Inhumaines conditions, combattre l’intolérable, éd. Odile Jacob, 2018.
// Les participants //
• Andreas Förster – Chercheur et traducteur, vit à Berlin
Projet de traduction du français vers l’allemand : Jacques Bouveresse, La Connaissance de l’écrivain : Sur la littérature, la vérité et la vie (éditions Agone, 2008)
” Traducteur indépendant, Andreas Förster traduit principalement des ouvrages de philosophie politique et d’histoire, surtout les auteurs libertaires et communistes. Il attend la publication de sa traduction de Mapping Ideology de Slavoj Žižek, philosophe slovène.
Convaincu que les livres importants font toujours leur chemin, il en est de même pour la vérité en fiction qu’adresse Jacques Bouveresse avec La connaissance de l’écrivain, qu’Andreas Förster propose aujourd’hui dans le cadre de L’atelier des philosophes : “La question du savoir se pose plus que jamais dans un temps où règnent les « fake news » et les « âmes bien-pensantes », où la dignité risque de s’écraser sous le poids de l’urgence. Que les livres en soient le remède.”
Andreas Förster – © María Porciel Crosa
• Laura Giuliberti – Traductrice français > italien / Titulaire d’un Master Traduction littéraire de l’Université d’Aix-Marseille et d’un Master de philosophie et critiques contemporaines de la culture de l’université Paris 8
Projet de traduction du français vers l’italien : David Lapoujade, Fictions du pragmatisme (éditions de Minuit, 2008)
“Je suis une jeune traductrice qui vit entre la France et l’Italie. Ma langue maternelle est l’italien et ma langue d’élection le français. J’ai commencé à traduire dans le contexte universitaire et j’ai eu ma première publication en 2017, en traduisant un livre de philosophie sur la notion de sujet chez Jacques Lacan. Suite à ce projet, j’ai décidé de me consacrer à la traduction et d’élargir mon horizon de travail, mes recherches dans le cadre du dernier master ont été en effet autour de la Poésie et de sa traduction.
Je voudrais continuer de cultiver mes deux passions, dont le croisement n’est ni nouveau ni anodin, à travers la traduction. Après deux ans de recherches poétiques, je me lance donc dans un projet de philosophie. Dans le cadre de cet “Atelier des philosophes”, je proposerai le livre de David Lapoujade : Fictions du Pragmatisme. Auteur d’un ouvrage important sur Gilles Deleuze, Lapoujade se propose ici de mettre sur un même plan deux expériences intellectuelles – et d’écriture – au premier abord inconciliables : les œuvres respectives des frères Henry et William James.”
• James Kelly – Traducteur indépendant français-anglais et espagnol-anglais, vit à Pau / Doctorat en traductologie de l’Université d’Edimbourg et membre de l’Institute of Translation and Interpreting du Royaume-Uni.
Projet de traduction du français vers l’anglais : L’autre métaphysique, de Pierre Montebello, Desclée de Brouwer, 2003
James Kelly est docteur en traductologie et traducteur indépendant espagnol-anglais, français-anglais. Il a obtenu son doctorat en traductologie de l’Université d’Edimbourg. Sa thèse doctorale a développé une formulation de la traduction comme problématique de la différence, selon les idées de Deleuze sur la représentation, et l’a appliquée à la traduction d’un roman chilien, A fuego eterno condenados de l’écrivain Roberto Rivera Vicencio. En plus de ses activités de traducteur, il est en train d’écrire un livre sur les paysages du Chili et ses peuples. Ses recherches pour ce projet l’ont amené à s’intéresser à des philosophes contemporains qui s’occupent des problèmes du temps et du rapport entre les humains et la nature. Pour l’atelier, il a choisi un extrait de L’autre métaphysique de Pierre Montebello (Desclée de Brouwer, 2003) qui se consacre à l’analyse de l’être humain dans le monde naturel à travers une étude de Nietzsche et de Bergson, parmi d’autres philosophes, pour tracer les contours d’une métaphysique qui peut résoudre la bifurcation cartésienne entre l’humain et le monde et ainsi refonder « l’unité originaire de l’homme et du cosmos ». Une sélection de ses publications en anglais est disponible sur www.geosoph.scot/writing.
• Céline Letawe – Docteure en philosophie et lettres (langues et littératures germaniques) et titulaire d’un diplôme d’études spécialisées en traduction, vit à Liège
Projet de traduction de l’allemand vers le français : Bernhard Waldenfels, « Ordnungen des Sichtbaren » in Gottfried Boehm, Was ist ein Bild? (1994)
Dans le cadre d’un projet d’anthologie de textes de la Bildwissenschaft jusqu’ici inédits en français, qui sera bientôt publiée aux éditions Mimesis sous le titre Bildwissenschaft – Débats contemporains sur l’image.
Céline Letawe enseigne la traduction allemand-français et la théorie de la traduction à l’université de Liège depuis 2011. Membre du Centre Interdisciplinaire de Recherche en Traduction et en Interprétation (CIRTI), elle concentre ses recherches sur la traduction collective et le transfert de théories. Elle a notamment travaillé sur les séminaires de traduction organisés par Günter Grass.
• Stephen A. Noble – Maître de conférences en Traduction et Traductologie à l’Université de Lille, où il enseigne la traduction (théorie et pratique) et la philosophie, vit à Lille
Projet de traduction du français vers l’anglais : Maurice Merleau-Ponty, La Structure du comportement (1942)
Stephen A. Noble est Docteur en philosophie de l’Université de Paris I — Panthéon–Sorbonne et ancien Chercheur post-doctoral auprès du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH/SSHRC), dans le Département de philosophie à l’Université McGill (Montréal, Canada). Il a enseigné dans des universités et Grandes écoles au Canada et en France, notamment l’Université McGill, l’École polytechnique, l’Université de Paris VII – Denis-Diderot, et l’Université de Paris X – Nanterre. Auteur de deux livres — Silence et langage (Brill, 2014) et La conscience perceptive (Zeta Books, 2014) — il a également publié de nombreux chapitres d’ouvrages et articles dans des revues traitant explicitement des questions philosophiques ayant trait aux thèmes du langage et de la traduction. Pour l’Atelier des philosophes à Arles, il propose de travailler sur une nouvelle traduction du premier livre de Maurice Merleau-Ponty (1908–1961), La structure du comportement, publié en 1942.
• François Ottmann – Agrégé de philosophie et docteur en philosophie des Universités de Paris 1 – Panthéon-Sorbonne et Leipzig / Enseignant de philosophie dans le secondaire
Projet de traduction de l’allemand vers le français : Salomon Maimon, Versuch einer neuen Logik der Theorie des Denkens (1794)
François Ottmann est ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure, agrégé de philosophie et docteur en philosophie des Universités de Paris 1 – Panthéon-Sorbonne et Leipzig. Après avoir été wissenschaftlicher Mitarbeiter à la Technische Universität de Dresde et ATER à Sorbonne Université, il enseigne actuellement la philosophie dans le secondaire. Membre associé du Centre d’histoire des philosophies modernes de la Sorbonne, il est spécialiste de la philosophie kantienne et de l’idéalisme allemand, plus précisément des implications de la révolution transcendantale dans la théorie du langage. À ce titre, il s’intéresse particulièrement aux problèmes théoriques et pratiques de la traduction.
Le projet d’établir la première traduction de l’ouvrage principal de Salomon Maimon, Essai d’une nouvelle logique ou théorie de la pensée (1794) vise à rendre accessible un texte qui a joué un rôle majeur dans la genèse de l’idéalisme allemand. Cette œuvre occupe en outre une place singulière dans l’héritage transcendantal en matière de théorie du langage, puisque l’auteur y aménage le transcendantalisme kantien de manière à ce que sa logique s’accorde autant avec une théorie des tropes issue des traditions linguistiques juive et arabe qu’avec le mathématisme de la caractéristique leibnizienne.
• Isis von Plato – Docteur en philosophie / Traductrice français > < allemand et anglais > français
Projet de traduction de l’allemand vers le français : Zur Anthropologie des Schauspielers, de Helmuth Plessner, 1948
Dans son article « De l’anthropologie de l’acteur » (Zur Anthropologie des Schauspielers, 1948), le philosophe Helmuth Plessner montre que l’activité de l’acteur ne consiste pas fondamentalement à accomplir un jeu d’illusion mimétique et factice mais avant tout à mettre en œuvre de façon spectaculaire le propre de l’humain, à savoir sa capacité de distance vis-à-vis de lui-même. Rien de plus authentiquement humain que cette manifestation de la « positionnalité excentrique », pour reprendre le concept clé de l’anthropologie philosophique de Plessner, dont l’œuvre majeure, Les Degrés de l’organique et l’homme (1928), est depuis peu accessible en français (traduit par Pierre Osmo, Gallimard, 2017).
Après des études d’histoire de l’art à Nantes, Londres et Rome, d’histoire et de philosophie à Paris, Isis von Plato enseigne l’esthétique à la Sorbonne et l’allemand à des élèves dans le secondaire à Paris. Docteur en philosophie, ses travaux de recherche ont porté sur les Lumières allemandes et l’éducation esthétique de Schiller, qui développe à travers la forme épistolaire une poétique du dialogue, où l’adresse est constitutive de la pensée.
D’origine franco-allemande, elle traduit dans les deux sens, ainsi que de l’anglais vers le français. Elle a notamment traduit pour l’édition Mark Twain et John Berger, dont l’anthologie Portraits paraîtra aux éditions l’Ecarquillé à l’automne 2019.
• Ninetta Antonina Strano, vit à Paris (France), doctorante à l’EHESS
Projet de traduction de l’allemand vers le français : Ernst Bloch, Das freie Wort, 1906/1907
Doctorante à l’EHESS/CéSor depuis septembre 2017, Ninetta Antonina Strano a pour sujet de recherche la philosophie allemande des siècles XIXe et XXe, et en particulier la Philosophie de l’Espérance d’Ernst Bloch. Après l’obtention de son Master II en Sciences Philosophiques en Italie, à l’Università degli Studi di Milano, elle commence une thèse sur la formation intellectuelle du jeune Bloch et ses sources philosophiques intitulée “Analyse de l’herméneutique religieuse d’Ernst Bloch à partir des écrits de la jeunesse : 1902 – 1921”, sous la direction de M. Pierre-Antoine Fabre. Dans le cadre de ses recherches, elle propose la traduction de fragments et de articles inédits en français, que Bloch a écrits ou publiés entre 1902 et 1908. Elle poursuit ce projet dans le cadre de L’Atelier des philosophes, notamment avec l’article “Über das Problem Nietzsches”, paru dans Das Freie Wort en 1906. Ce texte constitue une véritable source d’informations sur les influences du jeune Bloch et il pourra apporter des clarifications importantes sur son ontologie de la maturité.
• Laurent Vannini
Projet de traduction de l’anglais vers le français : Valentin-Yves Mudimbe, The Invention of Africa: Gnosis, Philosophy, and the Order of Knowledge (Bloomington / Londres Indiana University, James Currey, 1988)
“Dans un contexte de déni de la pensée coloniale et de perpétuation de cette pensée dans la conduite politique nationale (crise de l’accueil des migrants et stigmatisation des populations exilées, répression policière au faciès, etc.) et internationale (sous-traitance libyenne des frontières, instrumentalisation de la “radicalisation” dans l’hexagone et abandon des anciens alliés kurdes une fois « l’ennemi » Daesh maîtrisé…), dans le monde du travail (refus de contractualiser des travailleurs sans papier) ou encore le traitement journalistique (Obsession du voile sur les plateaux télévisés, tribune journalière offerte à la théorie du grand remplacement), l’œuvre de Valentin-Yves Mudimbe permet d’inscrire dans le temps, et plus spécifiquement dans l’histoire des pays européens francophones, des formes nouvelles d’un dogme ancien et résonne avec d’autres œuvres critiques récentes comme par exemple La Dignité ou la mort de Norman Ajari. La “lecture scientifique » de l’Afrique ne relève-t-elle pas plus d’une écriture dogmatique ? Et le “Nègre” est-il cet Autre de l’imaginaire colonial ? Traduire The Invention of Africa, premier livre de l’auteur en anglais après son exil aux États-Unis à la fin des années 70 pour fuir la dictature Mobutu, représentait une grande opportunité pour moi, non seulement parce qu’il est un auteur et un philosophe africain majeur, mais parce qu’il me permettait de poursuivre une trajectoire de textes remettant en question le traitement occidental dit scientifique de pans entiers de l’histoire et de l’expérience noires (entre autres, Écrire l’histoire depuis les marges : une anthologie d’historiens africains-américains, 1855-1965).”
• Ginevra Martina Venier – Doctorante à l’ENS, vit à Paris
Projet de traduction du français vers l’italien : Henri Maldiney, “Langue et révolution”, 1982, in n° thématique “Langage et révolution”
Après l’obtention de son diplôme à l’École Supérieure de Langues modernes pour Interprètes et Traducteurs de Trieste, elle entre en Master de traduction littéraire à Paris-Sorbonne et en master de Théorie de la Littérature à l’École Normale Supérieure. Elle est actuellement doctorante à l’ENS, où elle est également inscrite en deuxième année du master de Philosophie contemporaine.
Les recherches d’Henri Maldiney, à la conjoncture entre phénoménologie et poétique, constituent une des références qui fondent sa démarche théorique, qui s’articule autour de la théorie de la traduction, de la théorie littéraire, ainsi que de la philosophie. Les propositions contenues dans l’article qu’elle se propose de traduire, Langue et révolution (1982), sont les pivots de sa réflexion : “Si nous entendons la traduction, entre autres, comme le lieu d’un renouvellement de la langue qui, quant à elle, va dans le sens inverse d’une sédimentation idéologique, nous pouvons envisager le profit que la théorie de la traduction pourrait tirer des réflexions de Maldiney sur la possibilité d’une révolution d’ordre poétique de la langue”.
Les partenaires de l’Atelier des philosophes
La délégation générale à la langue française et aux langues de France.