Depuis le 1er septembre, le tout premier atelier français/coréen de la Fabrique des traducteurs est en résidence au CITL. Lundi, le travail de mise en voix des textes que les six jeunes traductrices ont choisis pour ce programme a débuté. Dernière étape de l’atelier, elles ont cinq jours pour préparer leurs “Encres fraîches”, deux lectures publiques qui auront lieu samedi 7 novembre 2015, à 17h15 au Capitole, à l’occasion des 32es Assises de la traduction littéraire à Arles, et mardi 10 novembre à 18h30 au Centre culturel Coréen à Paris. Voici en quelques mots comment Catherine Salvini, la metteur en scène, a abordé cette préparation.
Catherine, vous ne connaissez pas la langue coréenne, comment travaillez-vous avec les traductrices de l’atelier ?
C. S. : Effectivement, je ne parle pas le coréen et je travaille principalement à l’oreille. J’écoute les traductrices lire, c’est elles qui ont fait la sélection des extraits qui seront présentés au public. Et bien sûr, je lis les textes français et les traductions vers le français. Je suis surtout attentive à leur articulation, au thème également mais surtout à la construction des textes. Ce que je cherche à entendre c’est comment les deux langues peuvent cohabiter. C’est un peu ça d’ailleurs l’histoire de la traduction, comment on passe d’une langue à l’autre et même comment entendre une langue dans une autre langue. C’est une histoire de musicalité, et dans ce que l’on fait ensemble, à l’oral, c’est la même chose.
Comment faites-vous cohabiter les textes justement ?
C. S. : Nous essaierons de faire entendre les textes de toutes les manières possibles, c’est-à-dire par des lectures alternées ou simultanées français / coréen, et parfois aussi avec des passages uniquement en coréen ou en français non traduits.
Y a-t-il un travail de mise en scène à proprement parler dans la mise en voix ?
C. S. : Non, nous sommes vraiment dans une lecture. Il n’y a qu’une traductrice qui a souhaité interpréter son texte, c’est Isabelle Hignette car elle est comédienne. Nous sommes dans un travail de mise en valeur du texte par le soin accordé au positionnement du corps dans l’espace, à la respiration. Chacune se présentera avant de dire son extrait et présentera le texte ainsi que l’auteur.
Lorsqu’on traduit, on travaille le plus souvent dans l’ombre, comment les traductrices vivent-elles cette étape de représentation ?
C. S. : Il y a de la timidité ou de l’enthousiasme pour certaines mais toutes se prêtent à l’exercice avec beaucoup de sérieux, elles sont très attentives aux techniques que l’on aborde ensemble telles que l’intention, le regard vers le public. Je les aide à donner envie aux spectateurs de découvrir la littérature coréenne et les auteurs qu’elles ont choisi et qui ne sont pas encore traduits.
La lecture qui aura lieu samedi au Capitole et celle du Centre Culturel Coréen le 10 novembre à Paris sont-elles identiques ?
C. S. : Oui et non. Les extraits seront les mêmes mais dans les présentations, par exemple, le coréen aura plus de place à Paris puisque nous aurons un public différent. Pour la lecture des Assises de la traduction, nous privilégions la compréhension en français même si nous nous attachons à faire entendre le coréen.
Vous avez mis en voix plusieurs ateliers de la Fabrique des traducteurs, qu’est-ce que vous ressentez cette fois-ci ?
C. S. : Oui, j’ai fait l’atelier italien en 2011, le japonais en 2013… C’est toujours la même chose, j’arrive en me disant “mais qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire ?” et je trouve toujours à quelque chose ! J’aime découvrir de nouvelles langues, pour moi, encore une fois, c’est fondamentalement lié à la musique. C’est un exercice que j’apprécie énormément. Avec cet atelier, il y a aussi une grande diversité de genres avec des romans adultes, des textes pour la jeunesse, un texte en langue classique du XVIIIe siècle de Rousseau… Je les amène à prendre ces différentes voix. C’est très agréable car en très peu de jours, nous ne disposons que de cinq jours, ça bouge, les traductrices avancent très vite, elles accèdent à une autre dimension de leur texte et d’elles-mêmes, elles lèvent le nez de leurs écrans, en somme ! C’est un plaisir d’assister à cette métamorphose. Et puis cette fois-ci, j’utilise pour la première fois la vidéo et la musique, c’est une nouvelle façon d’envisager l’exercice.