Une Journée d’études sera organisée à l’université du Maine, le Mans (laboratoire 3L.AM), le 29 janvier 2016, sur les “Interprètes et traducteurs dans l’espace transatlantique : entre écueils et déplacements des frontières culturelles”. Les résumés des communications proposées (10 lignes) sont à envoyer avant le 15 octobre 2015.
Quelle place ont occupé et occupent aujourd’hui les interprètes et les traducteurs dans les sociétés multiculturelles et plurilinguistiques ? Les actes de traduction sont les vecteurs d’une reconfiguration du sens réalisée à partir de la maîtrise supposée et de la mise en contact de codes linguistiques et culturels distincts. La journée d’études s’interrogera donc sur le rôle joué par ces “passeurs” et leurs “truchements” dans les processus de transferts culturels dans l’espace transatlantique du XVe siècle jusqu’à nos jours. Ce cadre chronologique et géographique large doit favoriser, grâce à une réflexion théorique, l’analyse des variations constatées dans les différentes aires culturelles, dues à la fois à des déterminismes d’ordre idéologique et fantasmatique.
La célèbre expression d’Antonio de Nebrija, “la langue, compagne de l’Empire” et la mythification de la Malinche, compagne et interprète d’Hernan Cortés lors de la conquête de l’Empire aztèque, illustrent les deux facettes de cette question complexe. D’un côté, Nebrija associe la langue à la stratégie impériale ; de l’autre, la Malinche est le symbole de l’interculturalité (voulue ou subie), d’où les polémiques que cette figure historique suscite. Bien évidemment, ces problématiques se sont également posées dans les entreprises impériales britanniques et françaises en Amérique du Nord. Il ne s’agit pas non plus d’une question révolue, puisque le plurilinguisme, qui caractérise la majorité des sociétés contemporaines, s’enracine dans l’histoire des États-Nations, ainsi que dans la croissante amplitude des migrations transnationales.
La journée d’études s’attachera à la relation que les interprètes et les traducteurs entretiennent avec le pouvoir, c’est-à-dire au rôle qui leur est attribué ou, au contraire, nié dans les politiques linguistiques des Empires coloniaux ou des États modernes. Le contrôle que les interprètes et les traducteurs exercent sur le discours de l’autre et, indirectement, sur l’autre, sera également examiné. Enfin, il conviendra de s’interroger sur la place qu’occupent l’interprétation et la traduction dans le déplacement ou le dépassement des frontières culturelles. La réflexion portera donc sur les effets dynamiques de la traduction, puisque celle-ci participe aussi bien à l’instauration de ce que l’ethnologie appelle la « bonne distance », qu’à la mise en relation de sens, de mémoires et d’aspirations diverses et parfois contradictoires, au-delà des murs idéologiques érigés çà et là.
La journée d’études sera pluridisciplinaire dans la mesure où les approches anthropologique, psychanalytique, philosophique, littéraire et historique mettront en lumière les enjeux du travail d’interprétation et de traduction dans des sociétés marquées par les phénomènes d’interculturalité et d’internationalisation.
Les résumés n’excèderont pas 10 lignes et devront être envoyés simultanément à :
• Rédouane Abouddahab : r.abouddahab@free.fr
• Caroline Cunill : cunillcaroline@gmail.com
Avant le 15 octobre 2015, accompagnés d’une brève notice biobibliographique. Les langues de communication seront le français, l’anglais et l’espagnol.
// Bibliographie indicative //
• Abouddahab, Rédouane, “L’écrivain comme truchement : écriture et engagement entre idéologie et singularité”, Écarts d’identité, Dialogue des cultures: de la traduction, vol. 113 (2008): 48-58.
http://www.ecarts-identite.org/french/numero/sommaire/som_n113.html
• Cunill, Caroline, “Los intérpretes de Yucatán y la Corona española: negociación e iniciativas privadas en la fragua del Imperio ibérico, siglo XVI”, Colonial Latin American Historical Review, vol. 1/4 (2013): 361-380.
• Derrida, Jacques, Le Concept de Littérature comparée et les problèmes théoriques de la traduction (1979-1980, six séances) http://www.idixa.net/Auteurs/PageListeDerrida.php. Boundary 2 (2010), vol. 37/3: 29-56.
Voir aussi Emily Pater, “The Right to Translation: Deconstructive Pedagogy in Comparative Literature, 1979/2009”.
• Fayer, John, “African Interpreters in the Atlantic Slave Trade”, Anthropogical Linguistics, vol. 45/3 (2003): 281-295.
• Federici, Frederico, and Dario Tessicini, eds., Translators, Interpreters, and Cultural Negotiators. Mediating and Communicating Power from the Middle Ages to the Modern Era. London, New York://Palgrave Macmillan, 2014.
• Karttunen, Frances, Between Worlds: Interpreters, Guides and Survivors. New Brunswick : Rutgers University Press, 1994.
• Kassai, Georges, Jean-René et al., Traduction et psychanalyse. Paris : Centre Étienne-Marcel, 1988.
• Ordoñez Cifuentes, José Emilio Rolando (coord.), El derecho a la lengua de los pueblos indígenas. México : Universidad Nacional Autónoma de México, 2003.
• Palmer, Patricia Ann, Language and Conquest in Early Modern Ireland: English Renaissance Literature and Elizabethan Imperial Expansion. Cambridge : Cambridge University Press, 2001.
• Payas, Gertrudis y José Manuel Zavala (eds.), La mediación lingüístico-cultural en tiempos de guerra. Cruce de miradas desde España y América. Temuco : Ediciones de la Universidad Católica de Temuco, 2012.
• Puente Luna, José Carlos de la, “The Many Tongues of the King: Indigenous Language Interpreters and the Making of the Spanish Empire”, Colonial Latin American Review, vol. 23/2 (2014): 143-170.
• Restall, Matthew, Seven Myths of the Spanish Conquest. New York: Oxford University Press, 2003.
• Roller, Heather Flynn, “River Guides, Geographical Informants, and Colonial Field Agents in Portuguese Amazon”, Colonial Latin American Review, vol. 21/1 (2012), pp. 101-126.
• Val Julián, Carmen, “Traduire au Nouveau Monde : pratiques de la traduction en Nouvelle Espagne, XVIe siècle”, in Dominique de Courcelles (dir.), Traduire et adapter à la Renaissance. Paris : Etudes et Rencontres de l’École de Charte, 1998, pp. 65-8.
Le site du laboratoire 3L.AM : http://3lam.univ-lemans.fr/