En mars 2017, les éditions Isabelle Sauvage ont lancé corp/us, une nouvelle collection multilingue dédiée à la poésie et au geste du traducteur. Un projet porté depuis longtemps par Sika Fakambi qui en est la directrice. Pour le lancement, six poètes originaires du Mozambique, du Ghana ou de la Barbade, inédits en français, y prennent corps et voix.
Au cœur de ce projet, explique Sika Fakambi, il y a “le geste d’un traducteur qui choisit un poème et s’en saisit, pour le partager ensuite sous toutes les formes vivantes que sont l’interprétation graphique, l’interprétation en voix, en corps” (Sika Fakambi avec Elisabeth Monteiro Rodrigues et Nii Ayikwei Parkes, dans l’émission “Danse de des mots” d’Yvan Amar le 24.03.17).
En effet, chacun de ces poèmes est présenté dans un coffret qui contient un livret où l’on trouve racontée par le traducteur sa rencontre avec le texte et présentés des éléments bio-bibliographiques, une affiche-poème – saluons les créations graphiques de Florence Boudet – et un cd déployant en voix le poème dans sa version originale puis dans sa version française, et enfin dans les deux langues simultanément, au gré d’habiles montages sonores de Samuel Lietmann. Les affiches comme les enregistrements sonores offrent une grande vibration aux mots du poètes, subliment le passage entre les langues, ce geste de création qu’est la traduction tout en respectant le souffle de l’auteur et de sa langue.
Avec une première série de publications qui propose une cartographie poétique panafricaine, la collection affirme, tant dans la forme que dans le fond, une ligne éditoriale engagée, politique. Elle compte à ce jour cinq poèmes publiés : blood money (remix) de Maud Sulter (UK, Écosse / Ghana), traduit de l’anglais vers le français par Sika Fakambi et vers l’allemand par Anna-Lisa Dieter, la prière de mon père de Kofi Awoonor (Ghana), negus de Kamau Brathwaite (Barbade), La moitié d’un citron vert de Nii Ayikwei Parkes (Royaume-Uni / Ghana), traduits de l’anglais par Sika Fakambi, et notre voix de Noémia De Sousa (Mozambique), traduit du portugais par Elisabeth Monteiro Rodrigues, ainsi que le premier recueil publié en France de Warsan Shire (Royaume-Uni / Somalie), Où j’apprends à ma mère à donner naissance.
Souhaitons un bel avenir à cette nouvelle collection qui porte haut la parole poétique et l’art des traducteurs.
Un exemple…
Blood Money (remix) / Maud Sulter
Titre original : Blood Money (Remix)
Traduction française : Sika Fakambi
Traduction allemande : Anna-Lisa Dieter
Maud Sulter (1960-2008) est née à Glasgow, d’un père écossais et d’une mère ghanéenne. Artiste plasticienne, photographe et poète, elle s’est intéressée à l’absence de représentation des femmes noires dans l’histoire de l’art en Europe, à l’histoire oubliée du génocide des Européens noirs durant la Seconde Guerre mondiale, et plus largement aux expériences complexes de la diaspora africaine dans la culture et l’histoire européennes depuis le xve siècle.
« (Rappelle-toi ce boxeur vietnamien à la télévision qui voulait juste rencontrer son père. Et rêvait d’Amérique. Il y en a des milliers comme lui, des Vietnamiens noirs. (Ils en ont même en Irlande aussi.) Pas moyen que je parvienne à faire rimer ce poème.
Toi, le ferais-tu? »
Un jour m’arrive ce poème de Maud Sulter, artiste écossaise et ghanéenne dont je découvre l’existence à l’occasion de sa première exposition en France en 2016. Traduisant Blood Money (remix) pour la série Syrcas, je sais qu’il me raconte quelque chose de cet aïeul disparu, son absence de toujours – l’histoire perdue de mon arrière-grand-père Moëvi, cuisinier chez des patrons allemands dans le Togo colonial, qui embarqua avec eux pour l’Allemagne entre les deux guerres, et que ma grand-mère, sa fille, Adolé Elisabeth Akueson Moëvi, alors âgée de quinze ans, n’a plus jamais revu.
(Sika Fakambi)
Écouter, voir…
Retrouver la collection corp/us
• Lors de la rencontre “Nouveaux paysages de la traduction – L’expérience de trois traductrices” à la SGDL
Mardi 30 mai 2017 à 19h30
Avec Sika Fakambi, Lucie Modde et Elisabeth Monteiro Rodrigues. Une rencontre animée par Mona de Pracontal.
Hôtel de Massa – 38, rue de Faubourg Saint-Jacques – 75014 Paris
• Pour la 35e édition du Marché de la Poésie
Du mercredi 7 au dimanche 11 juin
Place Saint-Sulpice – Paris 6e
• En librairie
– Librairie Michèle Ignazi, Paris 75004
– Librairie portugaise & brésilienne, Paris 75005 [notre voix de noémia de sousa / en exposition]
– L’Espace L’Autre Livre, Paris 75005
– Librairie La Friche, Paris 75011 [corpus en exposition]
– Librairie L’Imagigraphe, Paris 75011
– Librairie Libralire, Paris 75011
– Librairie Violette & Co, Paris 75011
– Librairie L’Arbre à Lettres, Paris 75012
– Librairie L’Atelier, Paris 75020 [corpus en exposition]
– Librairie de la BNF, Paris 75013 [corpus en exposition]
– Librairie du Théâtre de la Colline [corpus en exposition]
– Librairie Le Divan, Paris 75015
– Librairie L’Usage du Monde, Paris 75017
– Librairie Anima, Paris 75018
– Librairie L’Attrape-Cœur, Paris 75018 [corpus en coup de cœur]
– Librairie L’Humeur Vagabonde 75018 [corpus au comptoir]
– Librairie Texture, Paris 75009
– Librairie Le Comptoir des Mots, Paris 75020
– Librairie Equipages, Paris 75020
– Librairie La Vie devant soi, Nantes 44000
– Librairie Vent d’Ouest, Nantes 44000 [corpus en exposition]
– Librairie-Café L’Autre Rive, 29690 Berrien
– Librairie-Café La Dame Blanche, 56 290 Port-Louis
– Librairie Le Livre, Tours 37 000
(liste non exhaustive)
À lire / À écouter
Danse des mots, Yvan Amar / RFI
http://www.rfi.fr/emission/20170324-corpus-collection-sika-fakambi-isabelle-sauvage
Le blog “Lou et les feuilles volantes”
http://louetlesfeuillesvolantes.blogspot.fr/2017/04/corpus-traduire-est-un-geste.html
Au singulier par Marie Richeux / France Culture – À propos de Nii Ayikwei Parkes, Kamau Brathwaite et Maud Sulter, entre autres
https://www.franceculture.fr/emissions/au-singulier/sika-fakambi